L’équipe 2, Dynamiques sociales et politiques de la vie privée invite à la prochaine séance de son séminaire.
Intervenante : Marianne Modak, professeure honoraire à la Haute école de travail social et de la santé de Lausanne (HETSL, Suisse).
Intitulé de l’intervention : La circulation des enfants dans les familles contemporaines : quels enjeux de recherche ?
La notion de « circulation des enfants » (ou « fosterage »), terme forgé en anthropologie qui désigne des pratiques institutionnalisées de déplacement des enfants dans la parentèle, notamment en Océanie ou en Afrique de l’Ouest, est-elle pertinente pour éclairer les pratiques familiales actuelles, en France ou en Suisse, qui n’impliquent que rarement le déplacement de l’enfant entre différents ménages ? Si, effectivement, après divorce, le principe de coparentalité institue une résidence alternée de l’enfant qui circule entre les domiciles des deux parents légaux, elle est rarement pratiquée, la garde à la mère prévalant, en raison de la division sexuée du travail. La « délégation » de la parentalité, plus en accord avec les pratiques, pourrait être une notion alternative à celle de « circulation de l’enfant ». Les travaux sur ces questions, en lien avec la monoparentalité, analysés avec Louise Portar, montrent des lacunes : absence de repérage systématique et exhaustif de la division du travail parental entre tous les adultes impliqués ; manque de connaissance des stratégies orientant les formes de délégation du travail de parentage ; ainsi que des arbitrages à l’initiative de la délégation, impliquant les points de vue des intéressées, l’enfant compris.Ne faudrait-il pas plutôt aborder cette problématique, en s’intéressant aux modalités familiales d’externalisation du travail parental, et aux enjeux qu’elle soulève pour la dynamique et l’économie globales d’un collectif familial ? L’externalisation du parentage est un processus qui, au titre de travail domestique, implique un ensemble de pratiques ou de démarches – s’informer, évaluer, planifier, s’ajuster, gérer ses émotions – plus ou moins explicites et visibles, plus ou moins négociées entre les deux parents et avec l’environnement, souvent genrées, et dont les bénéfices et les coûts matériels, psychiques et émotionnels sont largement sous-estimés et rarement étudiés dans toute leur complexité, notamment en lien avec l’enfant et les tiers impliquées. J’ajouterai que j’évoque ici un projet de recherche qui a été refusé par le Fonds national suisse de la recherche scientifique, ce qui en rend la critique d’autant plus intéressante.
La séance aura lieu le vendredi 21 avril 2023, de 10h à 12h30 (horaire de démarrage pour les membres de l’équipe : 9h30), dans les locaux de la MSH LSE, en salle Berty Albrecht (16 avenue Berthelot - 69007 Lyon).
Contact : Marie-Clémence Le Pape
