Le Centre Max Weber vous invite à la troisième séance de son séminaire transversal 2018-2019.
Il accueillera trois intervenants autour du thème :
« Regards sociologiques sur les élites sportives »
- Frédéric Mougeot (CMW-TIPO) et Thomas Bujon (maître de conférences en sociologie à l’Université Jean Monnet de Saint-Étienne, chercheur au laboratoireTriangle), auteurs de Le sport dans la douleur. De l’automédication au Mental training (Presses universitaires de Grenoble, 2017)
L’apprentissage de la douleur dans le sport
La pratique intensive du sport expose les athlètes au risque de blessure et à des douleurs. Apprendre à gérer ces douleurs physiques et morales fait partie intégrante de la carrière des sportifs de haut niveau. Pour les faire disparaître, les atténuer, les soulager ou les contrôler, les jeunes athlètes sont conduits à consommer des antalgiques, à recourir à des traitements multiples et variés, mettant en danger leur santé. Ces pratiques se situent à la frontière entre le thérapeutique et le dopage.
L’ouvrage sur lequel s’appuiera cette intervention, basé sur des récits de jeunes sportifs, de leur entourage (parents, staff, médecins) et d’athlètes de haut niveau s’intéresse aux normes de santé que les sportifs transgressent, à leur perception de la douleur. Il se penche aussi sur leurs parcours de soins et leurs pratiques thérapeutiques, les risques qu’ils prennent et qu’on leur autorise à prendre au nom du sport et de la performance.
Il propose une réflexion renouvelée sur l’entrée dans le dopage et éclaire un phénomène émergeant : la consommation de médicaments antidouleur et des pratiques de Mental training dans le sport intensif.
- Frédéric Rasera (CMW-MEPS), auteur de Des footballeurs au travail. Au cœur d’un club professionnel (Agone, 2016)
Footballeurs professionnels. Une ethnographie des travailleurs du spectacle sportif
« Le coach entre dans la salle de détente du centre d’entraînement et interpelle Fabien, Fabrice, Henri et Kévin avec un léger sourire au coin des lèvres : "Vous êtes racistes, à rester ensemble là ?" Les quatre joueurs sont noirs de peau. Henri rétorque au nom du groupe, provoquant le fou rire de ses trois collègues : "Non, Fabrice il n’est pas black, c’est un Bounty !" L’expression signifie "noir à l’extérieur et blanc à l’intérieur". En l’utilisant pour désigner Fabrice, né au Congo et arrivé petit en banlieue parisienne, Henri, sénégalais, souligne leurs différences de socialisation que masque la référence raciale du coach. Décontenancé, ce dernier repart. Mais dans la foulée, Franck, un des entraîneurs adjoints, entre à son tour dans la salle de détente et reprend, plus énervé : "Henri je ne rigole pas ! Ça m’énerve de vous voir comme ça, entre vous !" Et Fabrice, tournant le dos à Franck, de lui répondre en rigolant : "Nous on ne peut pas parler avec eux, ils parlent des voitures qu’ils vont acheter, des maisons. Nous on ne peut pas, on est des piétons !" »
Loin des clichés de l’enfant gâté ou du sportif passionné, les joueurs des équipes de football professionnel sont engagés dans un espace où sévissent des rapports de domination féroces et où les inégalités entre travailleurs sont bien plus prononcées que dans la plupart des milieux professionnels.
À partir d’une immersion de plus de trois ans dans le quotidien de footballeurs appartenant à un club professionnel français, le livre qui servira de base à cette intervention nous fait entrer dans les coulisses d’une de ces entreprises du spectacle sportif pour y disséquer les différentes facettes du travail des footballeurs, qu’il s’agisse du poids de contrôle du « staff », de la mise à l’épreuve des corps, de la porosité des frontières entre travail et vie privée, ou bien encore des logiques de sélection avant chaque match.
La séance se déroulera le vendredi 24 mai 2019, de 9h30 à 12h30, dans l’enceinte de l’espace Marc Bloch de la MSH LSE (14 avenue Berthelot - 69007 Lyon).
Le comité d’organisation du séminaire transversal du Centre Max Weber (Michèle Dupré, Marlène Bouvet, Christine Détrez et Corinne Rostaing).